Portrait : maître Maxime, atomicien sur SNLE

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Auteur : La rédaction

Portrait : maître Maxime, atomicien sur SNLE
@ Marine nationale

Pouvez-vous vous présenter ?

Je suis le Maître Maxime, j’ai 26 ans et je suis « KM »,  atomicien sur sous-marin nucléaire lanceur d’engins.

Quel est votre parcours ?

Je suis entré à l’âge de 20 ans par l’École de maistrance dans filière ENERGNUC. Avant mon engagement j’ai obtenu un Bac S et un IUT Mécanique & productique.

Comment vous êtes-vous engagé dans la Marine puis dans les forces sous-marines ?

A l’issue de mon IUT je souhaitais intégrer le monde du travail rapidement car la carrière d’ingénieur promue par mon établissement ne me faisait pas rêver. J’ai eu la chance d’avoir un professeur ancien militaire de l’armée de l’Air qui m’a conseillé de pousser la porte du CIRFA de proximité. La chance fut de nouveau présente lorsque j’ai rencontré mon conseiller qui était un ancien sous-marinier et qui a su piquer ma curiosité et me motiver à entrer dans la filière ENERGNUC. Je suis donc entré à l’École de maistrance en 2016 pour entamer le cursus atomicien et aujourd’hui je suis qualifié brevet supérieur en tant qu’opérateur machine « KM » (sur réacteur nucléaire).

Vous avez achevé votre première patrouille il n’y a pas si longtemps, qu’avez-vous ressenti ?

J’avais hâte, et en même temps un peu d’appréhension. La particularité de mon parcours c’est que j’ai intégré mon premier équipage de SNLE en sortie de grand carénage (travaux majeurs menés à des fins d’innovations technologiques). C’était passionnant mais nous n’avons malheureusement pas pu prendre la mer cette période-là. Très vite j’ai été retenu pour obtenir mon brevet supérieur et suis donc reparti sur les bancs de l’école atomique de Cherbourg. Quand je suis revenu, j’avais déjà quelques années de Marine à mon actif, mais aucune passée en mer ! Alors cette première patrouille était forcément un peu impressionnante, surtout que mes connaissances ne portaient que sur la théorie et les simulateurs d’entrainement.

Comment avez-vous vécu cette première fois ?

C’était assez symbolique. J’avais à cœur de montrer ce que je savais faire tout en ayant l’appréhension de le faire car c’était la première vraie mise en application de mes connaissances. Mais heureusement, nous sommes très bien accompagnés et nous pouvons compter sur l’expérience des anciens pour nous rassurer. L’esprit d’équipage m’a beaucoup marqué. C’est une 2e famille, d’autant que je ne suis pas de la région, mes seules connaissances sont mes collègues, qui sont aujourd’hui des amis proches, même en dehors de la base navale.

Qu’est-ce que cela représente pour vous d’assurer le bon fonctionnement d’une chaufferie nucléaire de SNLE en tant que jeune atomicien ?

C’est une grande fierté. Parce que c’est hors du commun et je suis fier d’exercer ce métier à bord d’un sous-marin. Cela aurait pu être dans une centrale nucléaire civile, mais le goût de l’aventure est plus fort. Je suis fier du parcours effectué et d’être là où je suis aujourd’hui : au poste d’opérateur machine (KM) et d’avoir à charge la gestion de la production d’énergie délivrée par la machine, ce n’est pas anodin à plusieurs centaines de mètres de profondeur !

Quels sont les enjeux de votre poste ?

A la mer, mon rôle est de contrôler, maitriser la libération de la vapeur générée par la machine pour la production d’énergie dans les turbines, pour la propulsion du sous-marin. Je contrôle également à l’injection de vapeur jusqu’aux turbo-alternateurs et dans les usines de production d’eau douce.

Nous travaillons en trio avec un opérateur réacteur (KR) qui gère la puissance générée par le réacteur en fonction des ordres donnés par le commandement (plus ou moins de vitesse par exemple) et un ingénieur de quart (niveau officier) qui coordonne nos actions et prend les décisions. Pour nous aider, 1 mécanicien (rondier) et 1 électricien (COMPARS) sont déployés. Ce sont souvent des marins avec une certaine ancienneté, qui connaissent la machine par cœur et savent repérer au moindre coup d’œil les éventuels dysfonctionnements.

A quai, mon rôle est de maintenir une surveillance permanente sur la machine car ce n’est pas comme un moteur de voiture que l’on arrête et qui n’émet plus d’énergie. L’énergie nucléaire est bien plus complexe et demande une vigilance de tous les instants. Nous avons des procédures strictes à suivre et des étapes à franchir dans le refroidissement et le réchauffage de la chaufferie.

D’un point de vue humain, parlez-nous de la vie en équipage. Comment s’est passée votre intégration à bord pour cette première patrouille ?

J’appréhendais un peu mais ma motivation et l’accompagnement de mes camarades ont tout de suite essoufflé ce sentiment. Il y a un grand esprit de famille et de fraternité à bord. Nous comptons tous les uns sur les autres. Le rythme de vie à bord est une machine bien huilée : nous travaillons par quart et nous avons des moments de distractions qui nous permettent de souffler. Nous avons des moments « clés » dans la semaine notamment autour des repas (à thème bien souvent, ciblés sur certains jours de la semaine) qui nous permettent de passer les semaines plus facilement et de nous rendre compte que finalement, ça passe vite !

Le sentiment d’entraide et de confiance est également très fort : je mets ma vie dans les mains des détecteurs et opérateurs sonars pour assurer la bonne conduite du sous-marin, tout comme ils mettent leur propre vie entre les miennes pour assurer la gestion de l’énergie et de la propulsion du bateau. Nous avons tous un socle de connaissances commun avant de se spécialiser. Nous sommes par exemple tous pompiers à bord et nous savons tous comment réagir en cas de problème majeur, nous avons appris les mêmes gestes et les répétons ensemble régulièrement pendant la patrouille par des exercices. De quoi renforcer encore un peu plus notre cohésion d’équipage.

Comment votre famille a-t-elle vécue cette « première fois » ?

Pour mes parents cela s’est plutôt bien passé, nous en avions beaucoup discuté avant le départ. Cela a été un peu plus émouvant avec ma conjointe car elle était enceinte lorsque je suis parti. J’avais peur de manquer la naissance de notre enfant mais lorsque nous sommes rentrés, j’ai retrouvé son ventre bien rond et la naissance a eu lieu quelques semaines plus tard. J’appréhendais le bon déroulement de la grossesse car à distance et sous l’eau nous sommes impuissants en cas de problème. Heureusement elle fut bien accompagnée par le bureau des familles de l’escadrille et les familigrammes m’ont aidé à suivre la grossesse malgré tout, tout se passait bien. C’est une situation que nous acceptons tous les deux, cela fait partie de mon métier et la vie doit continuer pendant les périodes de mission.

Après cette expérience hors du commun, comment envisagez-vous l’avenir au sein des FSM ?

J’ai encore quelques patrouilles en tant que KM à effectuer et ensuite je me projette bien en tant que rondier ou COMPARS, c’est un peu la suite logique. Je ne suis pas encore certain de passer une sélection interne pour devenir officier, c’est encore un peu loin. Mais, dans tous les cas, je souhaite rester au sein des FSM jusqu’au bout !

Si vous aviez des conseils à donner aux jeunes qui souhaiteraient s’engager ?

Je leur dirais que pour s’engager dans la Marine et plus largement dans les FSM, il faut s’investir tant professionnellement que personnellement. Cela doit être un projet réfléchi car ce n’est pas « juste » un métier, c’est une vocation. C’est un engagement personnel et il faut mériter sa place. On en demande beaucoup, très vite, il faut toujours penser plus loin et savoir se remettre en question. Si cela peut faire peur, il faut toutefois avoir en tête que l’accompagnement est de tous les instants. A chaque étape de notre carrière, que ce soit à l’école ou à bord, nous sommes formés et accompagnés jusqu’au bout pour ces métiers d’exception. Les entrainements sont également faits pour confirmer l’acquis des compétences et corriger ce qui doit l’être pour la bonne sécurité de l’équipage à la mer. Les FSM s’appuient beaucoup sur l’expérience, le respect des anciens est de mise car ils rassurent par leur sagesse et expériences de mer, leurs connaissances sont précieuses et nous aide à avancer. Pour ceux qui sont prêts à s’investir dans une institution disposant de valeur fortes basées sur l’esprit d’équipage et la technicité, foncez !

MT Maxime